Mariée, deux enfants, Caroline Jehanno a 43 ans. Elle est assistante sociale. Elle n’a jamais été encartée dans aucun parti auparavant. La Bretagne, elle la connaît depuis toujours parce qu’elle y est née et que sa famille est bretonne. Elle a donc grandit et vécu naturellement en Bretagne sans se poser la question “suis-je Bretonne ?”. Pour elle, la Bretagne était juste une évidence qu’on n’a pas besoin d’asséner sans arrêt puisque vécue au quotidien. Elle explique un premier engagement pour la langue bretonne au sein du réseau Diwan comme parent d’élèves. Elle raconte aussi son début d’engagement dans la vie publique, une vocation née récemment avec la fronde bretonne. Les manifestations de l’année 2013 lui ont fait prendre conscience d’une volonté jacobine d’éteindre toute forme d’affirmation d’un “être Breton”. Nous l’avons laissé librement se présenter et s’exprimer. Son témoignage :
“Je suis née en Pays de Saint Malo, où l’on parle Gallo plutôt que Breton, très tôt j’ai entendu parler français, breton, gallo et arabe -grâce à mes parents qui avaient été coopérants en Algérie-. Je suis issue de l’une de ces familles bretonnes, aux nombreux enfants, ouverte sur le monde, animée de fréquents débats politiques où confronter les points de vue est acquis.
J’avais 24 ans quand Mamm Gozh Julienne m’a fait découvrir son trésor : son costume traditionnel de paysanne du Pays de Pontivy et a réveillé mes racines alors que je faisais mon tro breizh professionnel.
Caroline Jehanno à deux enfants. Elle est assistante sociale. Elle n’a jamais été encartée dans aucun parti auparavant.
« A l’Age venu la découverte », la maternité, des prénoms bretons pour nos enfants, choisir la scolarité en filière bilingue publique, m’apercevoir que l’enseignement du breton à l’école est un combat chaque année -même en Morbihan l’un des départements où le taux de scolarité en filière bilingue, est parmi les meilleurs- ; je suis entrée en militantisme pour la Bretagne , par cette porte.
Fin 2013, les bonnets rouges descendent dans la rue. Je prends une claque en pleine face !
Et moi qu’est ce que je fais pour que fonctionne ce slogan : «vivre, travailler décider en Bretagne, en Bretagne réunifiée» ?
Le temps d’observation passée, j’ai rejoint et animé le comité local des Bonnets Rouges.
Début 2014, j’entends parler de la liste du Parti Breton pour les élections municipales ; j’observe aussi des militants indépendantistes. Les sites http://www.independance-bretagne.com et https://partibreton.bzh m’en apprennent plus : c’est concret, contemporain, pragmatique, adapté à notre territoire, riches de propositions économiques réalisables. Face à la vague dévastatrice qui sévit sur l’activité économique ces trois dernières années, je me dis régionaliste. Je continue de côtoyer les différentes composantes des militants pour la Bretagne, les bonnets rouges, l’EMSAV, plusieurs partis politiques, des collectifs, et participe à la manifestation pour la réunification du 27 septembre 2014 à Nantes, parmi plus de 30 000 personnes.
La réforme territoriale et son lot d’espoirs et d’immenses déceptions, sème la colère et ravive la détermination face à ce pouvoir central qui ne cesse de marteler : une seule nation, un seul peuple, une seule culture, une seule langue. Le vocable évolue… autonomiste ?
Depuis des décennies, des bretons tentent de faire entendre leur volonté et leur capacité à construire une région autonome. A la veille de ce prochain scrutin local, nombre de partis se disent favorablement régionalistes. Qu’ont-ils fait pour participer à la réforme des régions, en considérant les particularités de notre territoire ? Qu’ont-ils fait pour sauvegarder l’emploi en Bretagne réunie ?
Je porte un réel intérêt à l’idée de me séparer des clivages gauche droite. Ces clivages sont bien trop éloignés de la réalité de la population. A mon sens, la vraie porte d’entrée pour exercer un rapprochement avec les bretons, c’est l’économie et l’autonomie des finances régionales.
Proposer une alternative bretonne véritable qui soit adaptée aux besoins locaux est tout à fait compatible avec une vision de l’Europe fédérée de nations souveraines où le peuple pourrait mettre en œuvre une démocratie digne de ce nom. Le parti Breton, et la liste Notre chance l’indépendance défendent un processus à réaliser par étapes, et une mise en œuvre réaliste.
Nous, bretons, nous en avons les capacités. Un exemple concret emprunté à l’éducation, quand bien même les collèges ne sont pas du ressort de la région : aujourd’hui un élève du collège Diwan coûte moins cher qu’un élève scolarisé en filière publique. Nous avons la preuve qu’une association bretonne est tout à fait capable de faire mieux que l’administration française.
Je suis mère, je pense à l’avenir de nos enfants, bretons de demain.
Dans l’espace européen, l’avenir se joue dans un fédéralisme animés par des peuples qui osent affirmer leur indépendance vis à vis de leurs gouvernements centraux respectifs à l’instar de l’Ecosse et de la Catalogne, et ainsi consolider une Europe plus forte face à l’impérialisme économique américain, chinois et français.
Alors le 6 décembre 2015, je porterai dans l’urne un bulletin breton, comme une issue sensée, une alternative aux partis politiques centralisateurs et uniformisants.
Je voterai pour «notre chance l’indépendance, trawalc’h breizh dizalc’h».”