Yves François Le Coadic, membre du Conseil National du Parti Breton vient de faire paraitre dans la rubrique « Point de vue » d’Ouest France un article portant sur l’utilité du Grand Ouest universitaire à l’heure de la réforme territoriale.
La nouvelle loi sur l’enseignement supérieur impose aux universités françaises de se regrouper pour acquérir une visibilité internationale. À l’heure de la réforme territoriale, qui doit elle aussi imposer un certain nombre de regroupements, le bien-fondé de cette opération pour la Bretagne et les Pays de la Loire pose deux questions. Y a-t-il une forte volonté de collaboration entre les sept universités concernées appartenant aux deux régions que certain(e) s voudraient voir fusionner ?
En février 2011, à Nantes, lors du colloque « Université et Territoires », n’était pas apparue une très forte « volonté de collaboration. Résultat : en 2012, ce fut l’échec de la reconnaissance d’un pôle d’excellence présenté par les deux regroupements régionaux. La constitution d’usines à gaz universitaires n’améliorera pas le mauvais classement des universités « ouestiennes ».
Si Rennes I apparaît dans le top 500 du classement de Shanghai, Nantes ne l’est pas alors que Cardiff, sa ville jumelle, est dans le top 200 ! Angers et Le Mans sont absentes également.
Seconde question : y a-t-il nécessité d’un lien avec la réforme territoriale en projet ? Comme par hasard, le conglomérat des universités « ouestiennes » est un conglomérat interrégional plaqué sur les divisions administratives Bretagne – Pays de la Loire.
S’il apparaît que l’assemblage des deux régions ne constitue qu’un ensemble bureaucratique de pays à identités distinctes, et non une véritable communauté humaine, il en sera de même de l’assemblage de leurs universités.
Elles ont aujourd’hui la chance d’être petites et d’avoir une majorité d’enseignants résidents. Ce qui ne les empêche pas de collaborer. La massification envisagée se traduira par une multiplication des enseignants non-résidents, des TGV-profs, due à la multiplication de pseudo-collaborations.
Pour Le Mans et Angers, la proximité de Paris n’incitera pas beaucoup leurs enseignants à se rendre à Lorient ou Brest. D’ailleurs, un certain nombre de leurs enseignants résident aujourd’hui à Paris ! Copie du grand Ouest territorial, lui-même médiocre exemple d’architecture territoriale, le grand Ouest universitaire n’est qu’une nouvelle invention de bureaucrates mégalomanes.
Comment est-il encore possible de parler de liberté académique et d’autonomie universitaire dans ce système ? Ces dernières apparaissent, ne l’oublions pas, comme des conditions préalables sans lesquelles l’Université ne saurait s’acquitter au mieux des responsabilités diverses que la société lui confie. L’autonomie recherchée actuellement par les ensembles régionaux dans le cadre de la décentralisation retrouve alors l’autonomie que n’ont jamais connue les universités d’État françaises. Cette autonomie qu’elles devraient obtenir pour perdre la médiocrité qui les caractérise et devenir des établissements de meilleure qualité. La seule structure viable devrait se réduire, dans le cadre de la Bretagne réunifiée, aux universités de Nantes à Brest et n’être qu’une simple structure de coordination comme l’Université du Québec. La visibilité internationale, elle, viendra des collaborations avec des universités étrangères de qualité plutôt qu’avec de piètres universités françaises.
Yves-François Le Coadic
Professeur honoraire du Cnam
Membre du Conseil National du Parti Breton