Claudio Pirrone est docteur en sciences économiques à l’Université de Brest, que veut dire pour lui «attractivité» d’un territoire ? Il est 19h00 dans le bar de la rue Savary «chez Chouchou», ce mardi à 19h00 à Quimperlé. Le lieu est à lui seul tout un symbole : une rue autrefois très commerçante, véritable artère entre basse et haute ville, a été en quelques dizaines d’années, complètement vidée de son sang. Mais un bistrot comme celui ci, et quelques entrepreneurs essaient d’inverser la tendance. «En trois ans, Chouchou en a fait plus pour cette rue que toutes les municipalités en trente ans», dit un participant.

 

 Dans ce bistrot, pour la deuxième fois en deux mois, Erwan Balanant, figure locale connue pour son engagement aux côtés de François Bayrou qu’il a accompagné dans sa campagne de communication et pour son «délestage» de ses charges d’élu par le maire de Quimperlé, organise une «agora» sorte de café philo pré-électoral où les idées s’échangent avec un spécialiste. Ce soir, c’est Claudio Pirrone, Italien d’origine, installé dans le Léon depuis 10 ans, passionné d’histoire : «savez vous que vous avez en Bretagne le plus haut menhir du monde (neuf mètres cinquante) ? A Stonehenge, ils ont cinq millions de visiteurs, et vous ? ».

 

 

 Et le cairn de Barnenez, qui a failli disparaître au profit d’une route, (un des trois monuments les plus anciens au monde) ne reçoit que 15 000 visiteurs par an. Le sujet, ce soir, est l’attractivité. Un mot qui se décline très souvent avec attrait et politique touristiques. Pour Paolo, la Région Bretagne a dépensé à tort 400 000 euros pour se définir une image. Les «terres océanes, villes océanes, métropole océane…» se multiplient, qu’il s’agisse de Moëlan sur mer, Quimperlé, ou Brest. Être, c’est d’abord «être perçu»’. Un territoire est mort quand il n’a plus de projet.

 

 Si mon objectif c’est de faire demain ce qui a toujours été, ce n’est pas un projet. La différence peut rendre attractif ou répulsif. Si on est identique on s’ennuie, mais si on ne s’entend pas on ne peut rien faire non plus. L’agriculture en Bretagne est structurante du territoire. 40% de l’activité en Bretagne est le résultat de l’agriculture alors que l’agriculture constitue 3% du PIB. En 2050, il y aura 9 milliards d’hommes à nourrir. Mais les pauvres, qui en représenteront les trois quarts seront tous des paysans… et n’auront pas les moyens de payer ce qui se produira en Bretagne. Il faut en finir avec les façons mécaniques d’envisager l’avenir.

 

 On est dans la dictature du pratique, à quoi sert de bouger le pion si je ne sais pas quoi faire avec ? Si je fais une zone d’activité, est-ce que je rends automatiquement mon territoire attractif ? Les politiques de toute l’Europe se sentent dans l’obligation d’être infaillibles, or ce qui est important, c’est la résilience, la capacité de rebondir, se donner les moyens de réussir et ne pas rester dans la sanctuarisation d’un passé mythique. Rien n’est irréversible : à Quimperlé en 1990, on avait l’estuaire le plus pollué d’Europe, aujourd’hui avec quatre stations d’épuration (qui épurent l’équivalent d’une ville de 120 000 habitants pour 10 000 habitants), l’estuaire de la Laïta est devenu l’un des plus propres d’Europe … La nature et l’histoire forgent aussi une identité et une attractivité : le passé ouvrier de Quimperlé, les luttes ouvrières, la bataille de la gare…

 

 Pour noter les éléments qui construisent l’attractivité d’un territoire on note les gens qui y habitent (ouverts, cordiaux, valeurs positives), le tourisme, l’image véhiculée par les produits exportés, la gouvernance (c’est pour cette raison qu’Israël est notée négativement), l’histoire, la culture et les exploits (Éric Tabarly, La Fayette pour la Bretagne, par ex.), … Et puis il y a aussi la création possible d’entreprise : la France est le 2e pays au monde pour l’entrave à la création d’entreprise. Il n’y a plus d’entrepreneurs en France. Il ne faut pas hypothéquer l’avenir : un territoire est rendu existant par son projet. Il doit construire des possibles, élargir ses choix, se donner la direction qu’il souhaite. Des petites villes comme Quimperlé vivent aujourd’hui un contexte défavorable. Il faut mettre en avant le concept d’attractivité durable pour ne pas mettre en danger les autres projets qui peuvent naître dans ce territoire.

Source : Agence Bretagne Presse

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