L'esprit du droit breton
Il s’agit d’un combat important et très actuel. La France, par une série de lois répressives, s’éloigne des principes démocratiques essentiels. Elle tend à supprimer la séparation des pouvoirs en rétrécissant sans cesse l’espace existant entre le politique et le judiciaire. L’idéal jacobin tend à faire du magistrat un simple maillon de la chaîne pénale répressive et non un garant des libertés individuelles. Il apparaît nettement que l’Etat français aspire à faire de la justice un simple rouage administratif, chargé de mettre en oeuvre sa politique. C’est là le plus grand danger, en manipulant nos peurs, le pouvoir français, rogne toujours davantage les libertés et renforce son imperium. Son axiome pourrait se résumer ainsi : l’ordre avant la justice.
Le Parti Breton prône à l’inverse une justice proche du citoyen et qui ait pour rôle de garantir les libertés et de protéger les citoyens de l’arbitraire des pouvoirs publics. Il est donc essentiel d’avoir une justice bretonne, de proximité, indépendante. Pour autant, le Parti Breton est conscient que la situation historique de la justice en Bretagne est complexe et qu’il est peu réaliste de proposer la création d’une justice bretonne ex nihilo. Les exemples européens d’émancipation dont le Parti Breton souhaite s’inspirer (Ecosse, Pays de Galles, Pays Basque, Catalogne) montrent que la justice est une des compétences qui est arrachée tardivement au pouvoir central. Il est donc important de faire preuve de réalisme et de pragmatisme.
Il est urgent de relocaliser les décisions et les pouvoirs économiques en Bretagne, afin que les Bretons puissent eux-mêmes prendre en main leur avenir économique.
— Dominig Yvon, Entrepreneur, membre des Bonnets Rouges et du Parti Breton
Vers une vraie séparation des pouvoirs.
Lorsque deux citoyens ou personnes morales vont devant la justice, leur opposition relève du tribunal civil. Mais, lorsque l’un ou l’autre s’oppose à l’administration, cette opposition relève alors d’une juridiction particulière: le tribunal administratif. C’est une branche juridictionnelle à part qui remonte jusqu’au Conseil d’Etat, dirigé par des hauts fonctionnaires aux ordres du pouvoir politique. Quand on lui intente un procès, l’Etat est donc en France juge et partie !
Les conflits entre les personnes physiques ou morales et les administrations doivent relever des juridictions civiles : un seul tribunal pour tous, mais aussi une procédure unique, qui soit gratuite, simple et rapide. A cet égard, l’exemple de la procédure prud’homale qui fonctionne bien et où les particuliers peuvent plaider seuls où assistés d’un délégué syndical est intéressant.
L’exception d’inconstitutionnalité.
En France, il est impossible pour un citoyen de faire vérifier par une juridiction la conformité d’une loi avec la Constitution. Cela s’explique par le fait que cette mission incombe au Conseil Constitutionnel dont les membres sont nommés selon des affinités personnelles et non élus. Il est donc impossible de plaider en France devant les juridictions « l’exception d’inconstitutionnalité » alors que cela est possible à l’échelle européenne.
Les Propositions du Parti Breton.
Une carte judiciaire réorganisée, pour une justice de proximité :Le Parti Breton part du principe que la justice doit être proche du citoyen. Hormis pour les affaires de grand banditisme, et de délinquance financière, la pratique judiciaire n’a rien à gagner à la concentration des tribunaux en un lieu unique. Une justice de proximité et organisée à l’échelle locale est à envisager en Bretagne. Le Parti Breton propose que la compétence judiciaire revienne en partie aux Pays, institutions locales bretonnes, pour ce qui est de l’organisation. Appliquant le principe de subsidiarité qui suppose de laisser agir les premiers concernées et ceux qui sont le plus au courant, il faut laisser les Pays organiser eux-mêmes leur administration judiciaire locale et créer les tribunaux dont ils ont besoin, où ils en ont besoin. Aujourd’hui, un conseil municipal se voit octroyer des moyens financiers en fonction du nombre d’enfants à scolariser, mais il reste ensuite libre de construire les écoles où il le souhaite dans sa commune. Le même système devrait être appliqué avec les tribunaux de proximité à l’échelle des Pays.
La démocratisation de l’administration judiciaire :Le Parti Breton préconise de réorganiser le pouvoir judiciaire selon trois échelons :
- Des tribunaux de proximité statuant sur les cas de la vie courante (problèmes de voisinage, petite délinquance, divorces, litiges commerciaux), et dans chaque grande commune un tribunal pénal.
- Des tribunaux d’appel à l’échelle des pays avec une chambre civile, une pénale et une commerciale.
- Une Cour de justice bretonne (Cour Suprême) qui statuera en dernier ressort, et sera la garante de l’indépendance de la justice. Elle devra juger en Droit et en fait, et ses décisions auront force obligatoire. Elle sera susceptible d’appel devant les cours européennes mais les juridictions inférieures ne pourront pas contredire sa jurisprudence. Le Droit européen primera sur le Droit breton. Elle sera composée de trois chambres de cinq juges élus. Une chambre civile, une pénale, une commerciale. Toutes les décisions seront collégiales.
Dans les institutions judiciaires que le Parti Breton souhaite mettre en place, il sera possible de plaider l’exception d’inconstitutionnalité. Si un citoyen le fait devant un tribunal, ce dernier pourra, s’il juge l’affaire importante, saisir la Cour Suprême et lui demander de se prononcer sur la question. Cela permettra d’associer le citoyen au contrôle des lois, et de responsabiliser le législateur. Cette pratique répandue dans de nombreux pays est un gage de stabilité du droit et de la démocratie. Elle n’a cependant de sens qu’à une condition : les juges chargés de cette question doivent jouir d’une réelle indépendance. Aujourd’hui le Conseil d’Etat et le Conseil Constitutionnel n’offrent aucune garantie d’impartialité vis à vis du pouvoir.
Une harmonisation européenne de la procédure et du droit pénal :Les Européens ont globalement le même avis sur les faits qui doivent être qualifiés de crimes ou de délits, ainsi que sur l’échelle des peines qu’il convient de leur appliquer. Il y a là une piste à creuser pour aider à l’unification européenne. En outre, la recherche d’une harmonisation européenne permettrait de dépasser le débat entre procédure accusatoire et inquisitoire. Le débat est technique et la réponse idéale n’appartient sûrement pas à une France resté napoléonienne, une réflexion issue de la diversité des expériences européennes, serait salutaire. Il importe d’être réaliste et de ne pas trancher trop clairement entre l’un ou l’autre système, qui ont chacun leurs inconvénients.